Les chiffres les plus récents parlent de 18,1% des français concernés par l’obésité, presque 1 personne sur 5. Ce sont presque 10 million de personnes touchées sur le territoire. En dehors de ce que représente ce chiffre et son évolution, savez-vous ce qui permet de définir qu’une personne est en situation d’obésité ou non ?
Ce qui se cache derrière le diagnostic de ce qui est une pathologie à part entière, c’est L’IMC. Ce calcul simple dont nous avons déjà tous entendu parler permet de faire un rapport simple entre votre taille et votre poids. Pourquoi cette méthode est-elle remise en cause ces dernières années, peut-on encore se servir de l’IMC et quelles sont ses alternatives ?
L’IMC, un mauvais indicateur ?
Inventé dans les années 1830 par un statisticien et un polymathe belges, l’IMC est défini depuis 1997 comme norme pour diagnostiquer les risques liés au surpoids et à l’obésité par L’OMS. Pour le calculer, divisez votre poids en kg par votre taille en m élevée au carré (Poids/Taille²). Une valeur au-dessus de 25 correspond à un surpoids et une valeur au-dessus de 30 indique une obésité.
C’est l’occasion pour moi de vous rappeler les risques auxquels l’obésité expose :
- Augmentation des risques de maladie cardio-vasculaire
- Augmentation du risque de maladie métabolique (Diabète de type 2, maladie du foie gras, goutte)
- Apnées du sommeil
- Problèmes articulaires
- Augmentation des risques de cancer
Ces dernières années, l’IMC fait régulièrement le sujet d’articles qui le remettent en cause. Inexact quant à la détection de l’obésité, stigmatisant, voyons ce qui lui est reproché.
Pourquoi l’IMC est-il remis en cause ?
L’obésité est une maladie chronique complexe qui se définit par un dépôt excessif de tissu adipeux (NDLR: Masse grasse) pouvant nuire à la santé.
Organisation Mondiale de la SantéCette définition établi un lien entre la graisse corporelle et les risques de santé, mais pas avec le poids. Aujourd’hui, on va même plus loin en attribuant certains risques plutôt à la masse grasse viscérale.
Pour ses détracteurs, c’est sa principale faiblesse, l’IMC ne fait pas le tri entre masse grasse, masse musculaire, masse hydrique ou masse osseuse.
L’IMC est un moyen simple de diagnostiquer le surpoids et l’obésité. Le calcul est facile à poser et peut être effectué aussi bien par un médecin que par n’importe qui disposant d’une calculatrice (ou d’un calculateur dédié sur internet) ce qui permet une sensibilisation et une détection précoce dans la plupart des cas.
L’IMC est un outil statistique, valable en situation générale, mais il contient des angles morts.
Par exemple, saviez vous que le seuil d’obésité peut varier selon les pays. En chine par exemple, il a été abaissé à 28 (au lieu de 30 chez nous). Les autorités ont constaté que le niveau de graisse est plus élevé pour le même IMC dans sa population. Les maladies liés à l’obésité apparaissent plus fréquemment sur des valeurs plus faibles.
S’il est possible de modifier une norme sur un peuple entier, il n’est pas possible de le faire à l’échelle individuelle.
Certains profils ont des chances de se retrouver hors des normes définies par l’OMS :
- Les personnes ayant une masse musculaire élevée
- Les personnes ayant une masse osseuse élevée
- Les personnes ayant une masse musculaire faible, une masse grasse normale à faible, mais une quantité élevée de masse grasse viscérale
- Les personnes sujettes à la rétention d’eau
Faut-il arrêter d’utiliser l’IMC ?
La question est évidente, si on sait que l’IMC n’est pas un moyen fiable de mettre en évidence une mauvaise santé métabolique, doit on s’en passer ?
Tout n’est pas tout blanc ou tout noir, c’est aussi vrai pour l’IMC. C’est une question d’objectif.
Pour connaître son poids idéal
Le côté rassurant que l’on peut trouver en calculant un poids idéal appuyé par un barème largement reconnu est parfaitement compréhensible. C’est une manière de fixer un objectif meilleure que l’arbitraire.
Cependant, il ne faut pas oublier que l’IMC est un outil statistique. Si il est plutôt juste en moyenne sur tous les humains, il peut être faux pour vous. Peut-être que votre IMC idéal est à 27, c’est à dire que vous êtes en bonne santé, à l’aise avec votre corps, et que si vous descendiez à 24, vous gardiez votre santé physique mais que les efforts que vous devez accomplir en permanence pour le maintenir vous demandent tellement d’énergie que votre santé mentale s’affaiblisse. Devriez vous vraiment chercher à maintenir un poids dans les normes de l’IMC ?
En revanche, si vous souhaitez définir un poids cible, il serait plus pertinent de rechercher au cours de votre vie un poids qui vous a permis d’être à l’aise et en bonne santé. Cette approche plus personnelle et donc plus adaptée a quand même ses limites, l’âge et l’environnement pouvant faire augmenter ou diminuer votre “poids de forme”. Au final, le meilleur moyen de savoir si votre poids actuel vous convient, c’est de questionner vos ressentis et de suivre votre santé.
Pour prévenir le risque de blessure articulaire
En tant que coach, c’est principalement dans cet objectif que nous utilisons l’IMC. Quand on se pose la question de faire courir, sauter un client, on calcule d’abord son IMC.
En effet, un poids trop élevé est un facteur de risque direct de blessure articulaire lors des mouvements à impact. Dans ce cas, l’IMC est réellement pertinent, puisqu’il s’appuie directement ce qui nous intéresse, le poids.
Malgré tout, il faut toujours faire preuve d’adaptabilité. Une personne avec une masse musculaire plus élevée a des chances d’amortir mieux les chocs (mais pas toujours) et peut donc courir sans risque avec un IMC plus élevé. C’est aussi le cas des personnes bien entraînée.
En tant que prévention
Quand il s’agit de sensibiliser sur une question de santé tout un pays, voire toute la planète dans notre cas, il est important que l’information soit simple, afin qu’elle soit entendue et comprise par le plus de monde possible.
Prenons l’exemple des “Manger 5 fruits et légumes par jour”, “Bouger au moins 30 minutes par jour”, il faudrait approfondir bien plus l’information. Mais si on disait d’emblée “Apportez dans votre alimentation quotidienne 55% de glucides, 25% de protéines et 20% de lipides”, on aurait bien moins d’effet, alors imaginez si on parle de micronutrition.
Tout le monde connaît l’IMC, quelques recherches supplémentaires permettent d’apprendre à l’utiliser alors il est un bon outil de prévention. C’est pour cette raison que vous n’avez pas fini d’en entendre parler et que vous le verrez partout. En revanche, quand l’IMC se révèle trop élevé ou trop bas, il est important d’en parler à un professionnel de la santé ou du sport pour en savoir plus
Quelles alternatives à l’IMC ?
D’autres outils peuvent aider à estimer plus spécifiquement la quantité de masses grasses.
La balance impédancemètre
La balance impédancemètre par exemple. Grâce à la mesure de la résistance électrique de votre corps, celle-ci peut estimer vos taux de masse musculaire et de masse grasse corporelles. En effet, la masse grasse est une très mauvaise conductrice électrique, alors que la masse musculaire, constituée de beaucoup plus d’eau permet aux électrons de passer plus facilement. C’est donc un moyen d’en estimer les taux.
Attention, la balance ne mesure que ce que le courant traverse. Celui-ci prenant toujours le chemin le plus court, les balances sans poignées ne peuvent pas estimer la composition du haut du corps.
Certaines balances utilisent même différentes fréquences de courant lors de la mesure, chaque tissu répondant de manière différente en fonction de celle-ci, la mesure est plus précise.
J’aime beaucoup cet outil car il permet de comprendre que le poids dépend de beaucoup de choses et pas uniquement de la masse grasse. Malheureusement, les valeurs données par les balances sont basées sur des estimations statistiques pour compenser ce qui ne peut pas être mesuré, elles sont donc imprécises, alors à prendre avec du recul.
L’IRC (Indice de rondeur corporelle)
L’IRC, c’est une formule spécifiquement réfléchie pour compenser les lacunes de l’IMC. Au lieu de se baser sur le poids, cet indice développé en 2013 utilise le tour de taille. Et ce pour une raison simple, c’est à ce niveau que se situe la graisse viscérale, principal facteur de risque des maladies liées à l’obésité. L’idée est à peu près aussi simple que celle de l’IMC, comparer le tour de taille à la taille de l’individu, un tour de taille trop élevé révélant un risque de santé.
Celui-ci a été validé grâce aux archives de dossiers médicaux de patients américains, il détecte plus précisément les risques de santé que l’IMC. Il peut être obtenu avec le calcul suivant : 364,2 - 365,5 × √(1 - [circonférence de la taille en centimètres / 2π] / [0,5 × la taille en mètres]).
Le calcul est un peu plus compliqué, mais rien n’empêche de créer des calculateurs comme pour l’IMC, en revanche la mesure de la circonférence de la taille requiert un mètre et un peu de connaissance pour savoir la mesurer.
Lui non plus n’est pas dépourvu d’imprécision. Quand l’IMC utilise le poids pour estimer la masse grasse, l’IRC mesure le tour de taille pour estimer la quantité de graisse viscérale. Cette dernière n’étant pas la seule qui fait varier le tour de taille, on comprend facilement la possibilité d’erreur.
Ce qu’il faut en retenir, ce n’est pas que l’IMC est un bon ou un mauvais indicateur. Il ne faut pas l’utiliser par défaut en partant du principe que sa vérité est absolue, mais il est pertinent dans plusieurs cas de figure.
Dire que l’IMC serait devenu obsolète pour tout parce qu'il n’est pas pertinent dans quelques cas de figure serait une erreur.
Comprendre comment il fonctionne et ce qu’il permet vraiment de mesurer permet de décider s’il est pertinent de l’utiliser dans chaque situation.
- Rethinking body mass index - S. Fraser - 2022
- Obésité et surpoids - OMS - 2024
- Étude épidémiologique nationale sur le poids et l’obésité - Observatoire Français d’Epidémiologie de l’obésité (OFEO), Ligue nationale contre l'obésité - 2024
- Body Roundness Index and All-Cause Mortality Among US Adults - Xiaoqian Zhang, MD1,2; Ning Ma, MD1,3; Qiushi Lin, MD, PhD4; et al - 2024